En phase avec la turbo-sieste
Que la sieste soit bonne pour la santé, personne ne l’a jamais contesté. Heureux l’homme qui peut chaque jour se poser un moment pour dormir et rêvasser entre deux périodes de travail. Aujourd’hui, on parle plutôt d’activité économique à la place de travail. Heureux l’homme donc, qui peut interrompre son activité économique pour rejoindre la passivité économique, qui relève en soi de la loi naturelle du moindre effort.
La fatigue crée des accidents, comme le constate le Bureau de prévention des accidents (BPA), notre grand frère qui nous veut du bien. Le voilà qui propose dans une campagne de prévention un concept dans l’air du temps la « turbo-sieste ». C’est-à-dire : prendre juste le temps de dormir quelques minutes, au grand maximum un quart d’heure, en cas de chute de paupières. Mais pas plus, sinon, « on tombe dans un sommeil profond et on risque d’être vaseux au réveil ». Le BPA ne manque pas de moyens pour s’étendre doctement sur le sujet. On ne roupille pas au BPA. Peut-être s’inspire-t-il du Japon où les pendulaires dorment tout le temps, dès qu’ils ont deux minutes dans un trajet. C’est tout le contraire de la sieste espagnole sans contrainte, réservée aux vacances gourmandes.
La turbo-sieste c’est comme l’amour à la Chirac : deux minutes, douche comprise. La turbo-sieste est donc tout le contraire de la sieste.
L’économie suisse pourra être reconnaissante de l’état d’esprit distillé par notre grand-frère à tous. Mieux que la micro-sieste ou la nano-sieste, la turbo-sieste est hyper-productive. Mais elle a ses limites. Plus on grimpe dans la hiérarchie, moins on est censé dormir. Les cadres, les performants, les leaders et les winners peuvent rarement se permettre une visite à Morphée dans leur agenda millimétré. Il leur reste la cocaïne. La turbo-sieste en fait, c’est la cocaïne du pauvre. Une petite ligne ou une petite sieste ? Quoi qu’il en soit : vivez la performance !